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Premier conte créé au salon
du livre
de Courcelles Chaussy:

Le livre magique.


Merci à mes co-autrices et auteurs pour leur talent:
Mine De Rien, Cestmoiquichoisis, Adèle Ivre, Stanislas Delapage, Image, Jeanne Délivre !

Merci aux organisatrices et organisateurs du premier salon du livre de Courcelles - Chaussy pour leur confiance et leurs sourires, pour leurs propositions et leur aide !
Vous êtes formidables!
Et maintenant... à vous de lire...

Notre
conte
collectif ;)

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dessins dragon.jpg

Le livre magique

 

Savez-vous qu’un livre peut être dangereux ? Savez-vous pourquoi ?

Oui, plusieurs raisons vous viennent à l’esprit. Mais surtout, un livre peut être dangereux… parce qu’il est magique !

 

Voici l’histoire vraie d’une magie oubliée et ignorée… Qui aurait pu détruire le monde ! Mais oui ! Comment a-t-elle été conjurée ? Par une seule chose : l’union, la solidarité, je dirais même... l’amitié !

 

Pas plus tard que la semaine dernière, en revenant du cimetière, j’ai aperçu un homme, courbé et qui semblait très âgé, qui entourait un coffre entouré de chaînes et de cadenas.

Curieuse, je m’approchai de lui. Voyant mon air intrigué, il me lança :

« Oh, tout ceci n’est pas très utile ! Mais on ne sait jamais !

- Vraiment ? plaisantai-je. Craignez-vous que votre chat (car la boîte était petite) se réveille et devienne un zombie-chat mortel ? »

Ma plaisanterie me fit rire. Mais l’homme ôta son chapeau, essuya son crâne lisse et hocha la tête d’un air qui signifiait que je ne comprenais rien. Son visage était grave. Si grave, que je cessai de rire.

« Il ne s’agit pas d’un chat. Pas d’un animal… Enfin, pas vraiment…

- Est-ce un monstre ? ai-je alors chuchoté.

- Oui, c’est tout à fait ça, me répondit-il en me lançant un regard brûlant. »

Un frisson me parcourut soudain le dos ! Un frisson froid, glacial, même, provoqué par la voix angoissée de l’homme.

« Je ne suis pas aussi vieux que j’en ai l’air, murmura-t-il. Avant, j’avais beaucoup de cheveux ! Puis, ils sont devenus blancs. Puis, ils sont tombés. Heureusement, des guerriers et des guerrières sont venu.e.s à mon secours... »

Alors, tout en recouvrant le coffre de terre, il me conta son histoire.

 

L’homme se nommait Pierre Aimé LYRE. Il était libraire et jouait aussi de la lyre, comme son nom l’y prédestinait. Il aimait les rayons de sa boutique, comme les lignes des portées de sa musique. Il aimait que ses livres soient bien classés, comme il n’appréciait que les notes précises et les mélodies parfaites. Il travaillait seul et il jouait seul. Nul ne savait quels étaient ses livres préférés ou ce qu’il jouait comme musiques. Nul.

 

Pierre Aimé Lyre n’aimait pas parler aux gens : il ne quittait que rarement sa librairie, qui emplissait tout le rez-de-chaussée de sa maison. Il habitait au-dessus. Mais nul ne venait chez lui, et il n’allait chez personne. Aussi ne connaissait-il même pas ses voisins.

Il n’aimait pas davantage les plantes et les animaux. C’est pourquoi il avait embauché un jardinier pour son jardin. Il ne se préoccupait que de sa librairie. C’est pourquoi la cave, qui était pleine de bric-à-brac lorsqu’il avait acheté la maison, n’avait jamais été rangée.

Or, un jour que son jardinier, qui avait un peu de temps libre et aimait rendre service, entreprit de la ranger un peu, il découvrit un très, très, très vieux livre. Il le prit délicatement, car il semblait très fragile, et le monta dans la librairie. Pierre Aimé Lyre le regarda à peine, tout d’abord. Puis, son jardinier parti, il se pencha vers lui et estima qu’il avait au moins trois mille ans ! Quel drôle d’ouvrage ! Bien sûr, comme vous vous en doutez, il l’ouvrit pour découvrir ce qu’il recelait…

Mais alors, une fumée jaune s’échappa d’entre les pages, un marque-page tomba à terre, et, tandis que la fumée emplissait tout le magasin, il se produisit un grondement terrible, et soudain jaillit de l’ouvrage un oiseau effrayant ! Il avait une queue de serpent et des ailes de chauve-souris, ainsi, dirent plus tard des villageois, que des cornes rouges au-dessus de la tête ! Tandis qu’il quittait les pages, les murs se mirent à trembler. Les étagères, pleines de dictionnaires et de romans, penchaient dangereusement ! L’animal grossit, grossit, de plus en plus, et s’enfuit par la fenêtre avant de grossir encore, tant et si bien que tout en montant vers le ciel il devint immense, aussi large qu’un nuage et de plus en plus effrayant ! Pendant qu’il s’éloignait, on pouvait voir ses yeux devenir rouges et brillants, ses ailes de plus en plus noires, et il cracha du feu tout en disparaissant dans les airs.

 

Notre libraire était très effrayé ! « Qu’ai-je fait ! s’écria-t-il. J’ai libéré un dragon ! »

Imaginez son désarroi, et la panique qui s’empara de lui à ce moment !

Par ailleurs, vous vous doutez bien que le tremblement avait inquiété les voisins !

Ils sortirent de chez eux et les plus hardis osèrent entrer dans la librairie d’où s’échappaient encore des volutes de gaz jaunâtre.

Ces courageux voisins, Pierre Aimé Lyre ne les connaissait pas. Mais il me faut vous les présenter pour que vous compreniez bien la suite de cette histoire.

Tout d’abord sont arrivés Mine De Rien et Adèle Ivre. Mine De Rien était un jeune homme à l’aspect rassurant et calme, portant toujours sur lui des crayons de toutes les couleurs, toujours bien taillés. Il savait bien dessiner et nul n’aurait imaginé tout ce dont il était capable ! Ses dessins semblaient si réels qu’ils auraient pu tromper n’importe qui, et il était si discret qu’il pouvait aller où il le voulait sans qu’on le remarque.

Adèle Ivre avait été ainsi surnommée parce que, lorsqu’elle était enfant, on se plaignait souvent par des « Ah ! Des livres !! », de la quantité de livres qu’elle voulait toujours emmener avec elle. Elle avait énormément lu, et elle parlait tout autant ! En devenant adulte, on lui disait qu’elle ne pourrait pas être plus bavarde si elle était saoule. Ce que, croyez-moi, elle n’était jamais ! Très cultivée et très maline, elle avait de grandes connaissances et savait ainsi délivrer de leurs entraves bien des inquiets. Adèle Ivre était réputée pour savoir délivrer.

Rapidement, ils furent rejoints par Image, une jeune fille très créative et qui s’intéresse toujours aux autres. Elle était capable de rendre vivante une photographie ou un dessin, tout comme de faire l’inverse ! Mais il s’agissait là d’un don qu’elle n’avait jamais osé utiliser !

Elle était souvent en compagnie de Cestmoiquichoisis, une jeune fille pleine de gentillesse et d’imagination, mais avec beaucoup de caractère.

Arrivèrent également Jeanne Délivre, une femme très travailleuse, dormant peu et brillant par son intelligence, ainsi que Stanislas Delapage, un homme patient et tolérant animé d’un grand sens du devoir et doté d’un grand courage.

Tous les six entouraient le pauvre libraire. Ce dernier n’était pas blessé, mais terrorisé par ce qui venait de se produire : « Un dragon ! Un dragon ! Il va tout détruire ! » murmurait-il. Adèle Ivre se pencha vers lui et, en quelques mots, sut l’apaiser : « Nous trouverons une solution », conclut-elle doucement.

« Pour commencer, il nous faut comprendre comment cela a pu se produire, déclara Jeanne Délivre. Reprenons ce livre et observons-le de plus près !

- Je… C’est que… Il est dan… dangereux, hoqueta Pierre Aimé Lyre.

- Nous n’avons guère le choix », affirma, d’un ton qu’il voulait apaisant, Stanislas Delapage, en prenant l’ouvrage et en tournant ses pages.

Mine De Rien ramassa le marque-page cuivré assorti à la couverture du livre pour l’y replacer, lorsque Cestmoiquichoisis s’exclama :

« Oh, ce marque-page ! Il y a des dessins et du texte dessus ! » Mine De Rien resta quelques secondes à observer la plaque métallique qu’il tenait entre les mains, puis s’aperçut que les tracés y représentaient un plan, ou plutôt… Oh, encore mieux ! C’était une carte !

Les six voisins de Pierre Aimé Lyre se penchèrent sur le marque-page de cuivre que tenait Mine De Rien et, leurs ombres mettant en relief des gravures, ils aperçurent un nid incomplet tracé sur une hauteur, au centre d’une carte qu’ils ne surent dans quel sens tenir… Alors Jeanne Délivre se mit à chercher, parmi les ouvrages de la librairie, un livre qui pourrait les éclairer quant à la vie des dragons. Pierre Aimé Lyre et elle trouvèrent rapidement un grimoire, qu’ils feuilletèrent nerveusement. « Là ! » s’écria soudain Image, en posant son doigt sur une page : on y décrivait à la fois l’instinct du dragon, qui, dans le monde réel, le poussait à pondre et élever des petits, et la nécessité de le maintenir sous forme d’image, pour empêcher qu’il n’envahisse et ne détruise ce monde trop petit pour lui. « Image… », murmura Mine De Rien. Tous se tournèrent vers elle. Elle avait le pouvoir de rendre le dragon inoffensif en le transformant en image. « C’est ainsi que nous pourrons le ramener et le remettre dans le livre », conclut Jeanne Délivre. Stanislas Delapage lança alors l’ordre de départ. « Courage à tous, leur dit Pierre Aimé Lyre d’un air grave. Moi, je vais rester avec ce livre et y chercher des réponses pour lui rendre le dragon. » Ils se quittèrent le cœur inquiet, mais fort, et Stanislas Delapage guida le groupe vers les montagnes, non sans que chacun ait été préparé un sac de voyage : chacun prit le nécessaire, mais Mine De Rien, qui ne se séparait jamais de ses crayons, en emmena plusieurs boîtes, et Adèle Ivre, qui avait lu beaucoup de livres, dont de nombreux ouvrages sur la nature, l’aventure et la survie, glissa dans son sac des équipements sportifs ainsi que des épices.

 

Ils marchèrent ainsi longtemps, longtemps, très longtemps, pour, enfin, distinguer précisément les formes des sommets qui barraient l’horizon. Mais tandis que d’un côté, ils apercevaient les couleurs des sommets recouverts de neiges éternelles, de l’autre, ils constataient que les sommets des monts, tout aussi hauts pourtant, étaient ceux de volcans. Un volcan en particulier dominait tous les autres. Et parmi les montagnes enneigées, l’une était également très haute. Voilà donc deux sommets, tous deux d’égale hauteur, mais l’un était à leur droite tandis que l’autre était à gauche.

« Oh non, s’exclama Cestmoiquichoisis, comment savoir ?

- On ne peut pas… répondit Mine De Rien en se penchant sur le marque-pages qui leur servait de carte. Le dessin pourrait très bien correspondre à une montagne, comme à un volcan. »

Image observa à son tour la carte et ses illustrations. En effet, elle n’était pas assez précise.

« Allons, déclara Stanislas Delapage, nous sommes fatigués et il est temps de se reposer. Nous prendrons cette décision demain ! » Jeanne Délivre approuva cette sage parole et tous les six montèrent rapidement un camp, se firent une soupe, pour se coucher en même temps que le soleil.

« Que c’est beau… » murmura Image en contemplant l’astre disparaissant derrière les montagnes. Les autres grognèrent vaguement, exténués, et tous s’endormirent en rêvant de montagnes et de soleil couchant.

 

Et ils dormirent à poing fermé… Du moins, jusqu’à ce qu’Adèle Ivre hurle de peur ! Et on la comprend ! Au-dessus d’elle se dressait un être qui lui sembla immense ! Très grand, il était vêtu de noir et brandissait un long poignard brillant sous les reflets de lune ! Jeanne Délivre se jeta aussitôt sur l’intrus, Stanislas Delapage lui attrapa le cou, et alors Mine De Rien, par un croche-pied, fit s’écrouler au sol leur mystérieux ennemi. Image, Adèle Ivre et Cestmoiquichoisis bondirent pour le maintenir au sol. Mais leur agresseur était très fort : il parvint à se redresser, et ils durent lutter durement. Ils tentèrent de l’assommer, mais il ne fut que blessé et il reprit son long couteau : il les menaça alors d’une voix glaciale, effrayante, qui fit se figer leurs jambes comme si elles congelaient. « Vous ne savez pas qui je suis ! Je suis le Mage Noir et je vous interdis de capturer mon dragon ! Il est à moi ! Maintenant qu’il est revenu, je ne le laisserai pas s’échapper ! Il sera mon arme, celle qui me permettra, enfin, de posséder ce monde pour y faire régner ma loi ! »

« Nooon ! » s’écria Cestmoiquichoisis ! Elle saisit une bûche de leur feu de camp pour attaquer le mage. Mais il jeta vers elle un souffle froid, qui éteignit les flammes et fit tomber la jeune fille.

« Ah, ah, ah ! Ni vous, ni les langues enflammées de mon dragon ne pourront m’empêcher de le posséder ! »

Les six aventuriers se levèrent tous ensemble pour foncer sur lui, mais il les évita et disparut dans la nuit : ils entendirent son rire glacial se moquer d’eux en leur ordonnant de retourner d’où ils venaient :

« Pauvres fous, je vous laisse une chance de rentrer chez vous, alors fuyez !!! » Et le Mage Noir repartit, s’éloignant vers la plaine pour soigner ses blessures.

 

Il fallut de longues minutes à la troupe de nos courageux aventuriers pour reprendre leur souffle.

« Quelle force, et quelle voix atroce ! dit enfin Adèle Ivre.

- En effet ! approuva Stanislas Delapage, il est glaçant !

- Ouais, c’est sûrement comme ça qu’il compte dompter le dragon… ajouta Mine De Rien. »

Soudain, Image et Cestmoiquichoisis fixèrent Mine de Rien, comme s’il venait de dire quelque chose de très important !

« Mais oui, tu as tout à fait raison, Mine de Rien ! » s’écrièrent en chœur Adèle Ivre et Jeanne Délivre. Mine De Rien observa ses compagnes et son compagnon sans comprendre, tandis que les cinq autres riaient de joie ! Jeanne Délivre déclara alors : « Le mage noir manie le froid, mais le dragon le chaud ! Nous le trouverons donc…

- Sur le volcan ! » terminèrent les cinq autres.

Plus déterminés que jamais, les six chasseurs de dragon plièrent bagage pour reprendre leur route : droit vers le haut volcan !

 

Ils durent marcher longtemps, et des panneaux indiquaient régulièrement le chemin vers « le plus haut cratère du monde ». Adèle Ivre décida de déplacer les panneaux, pour égarer le Mage Noir. Mine De Rien en profita pour en dessiner d’autres, très bien imités, qu’Image rendit réels en un claquement de doigts, et qui furent installés pour faire croire que le chemin du volcan était en fait le « détour rupestre vers les Monts de Glaces », ou la « voie privée du spa des sorcières », ou encore le route vers le « Nouveau tunnel vers le Mont des neiges éternelles ».

Ils durent ensuite grimper, grimper, grimper longtemps… Jusqu’à, enfin, parvenir au bord du cratère de l’immense volcan. De là-haut, on dominait tout le pays ! Quelle vue à couper le souffle ! Mais de souffle, ils en perçurent rapidement un… Un air chaud leur caressait le dos !

Se retournant doucement, ils furent saisis par la scène qui s’offrait à eux : blotti contre une paroi de pierre noire, et entouré d’une muraille de pierres arrondies et entassées pour former un gigantesque nid, un être recouvert à la fois d’écailles et de plumes, repliant d’immenses ailes, doté d’un bec dur et coupant, ronflait tranquillement. Il ne les avait pas entendus… Heureusement, il se trouvait à plusieurs dizaines de mètres qu’eux. Mais un immense fossé les séparait, comme si les bords du cratère étaient effondrés par endroits. Comment traverser ?

Heureusement, Adèle Ivre, qui avait lu beaucoup de livres d’aventure et de survie, avait emmené des cordes. De fines, mais très longues cordes. Elle y ajouta un crochet, et prépara un système de tyrolienne pour traverser.

On demanda à Stanislas Delapage de lancer le crochet, car il fallait de la précision, mais surtout, beaucoup de calme. Il réussit. Mine De Rien et Jeanne Délivre installèrent la tyrolienne. Mine De Rien voulut traverser pour rejoindre le dragon :

« Dès que je serai près de lui, dit-il à Image, tu le transformeras en image et je le mettrai dans ma poche !

- D’accord ! » s’exclama Image, prête à rendre sage comme une image l’immense monstre qui ronflait.

Mine De Rien se laissa glisser vers le dragon, mais son arrivée fut dangereuse : il faillit glisser, heurta le sol, ce qui provoqua un effritement léger, mais arracha un cri de peur à Cestmoiquichoisis ! Tout ceci fit ouvrir un œil, puis le deuxième, au dragon qui se mit alors à chercher, de son regard rouge brûlant, l’origine de ce dérangement. Mine De Rien s’accroupit derrière le mur de pierre qui formait le nid, et Stanislas Delapage, sans perdre une seconde, se mit à courir le long du cratère, comme s’il voulait en faire le tour pour rejoindre le dragon. Il tapait si bien des pieds, que le bruit attira immédiatement l’attention du monstre qui agitait déjà la tête pour sortir de sa torpeur. Mine De Rien n’avait donc pas été repéré. Adèle Ivre, qui savait si bien parler, se mit alors à appeler le dragon, et lui adressa une formule de politesse suivie de la prière de ne pas se fâcher car ils étaient ses amis. Le dragon la regarda avec intérêt et semblait l’écouter. Ce qui n’était pas très étonnant, car, à la surprise générale, Adèle Ivre parlait si bien, qu’elle parlait même la langue des dragons !

Stanislas Delapage avait cessé de courir et faisait signe à Mine de Rien de se préparer. Image se plaça à côté d’Adèle Ivre, face au dragon, et tandis que son amie parlait doucement, elle claqua des doigts. Aussitôt, le dragon sembla disparaître : il se transforma en une grande et belle image, qui voletait au-dessus du nid géant que Mine De Rien escalada vivement. Il l’attrapa, la roula, et puisqu'elle était trop grande pour entrer dans une poche, il l’accrocha dans son dos avec un morceau de corde et retourna près de ses amies en tyrolienne, tandis que Stanislas Delapage revenait en marchant. Mais, avant qu’il n’eut rejoint le groupe, un rire sonore et glacial retentit.

 

Le Mage Noir venait de les rejoindre, et d’un saut il se plaça prestement face à Mine De Rien.

« Donnez-moi mon dragon, ordonna-t-il.

- Jamais ! » s’écria Cestmoiquichoisis, prête à se battre.

Mais Image la retenait : ils ne pouvaient pas le vaincre ainsi !

 

Le Mage Noir avait tourné le dos à Mine De Rien quelques secondes, pour menacer Cestmoiquichoisis. Le garçon en profita pour sortir ses plus gros crayons, et tracer un cercle derrière le mage. Puis, il recula pour s’éloigner du bord du cratère. Alors que le mage allait se retourner vers lui, Stanislas Delapage l’interpella : « Tu ne peux pas nous vaincre ici, le dragon est de notre côté, maintenant ! 

- Ah, tu crois ça ! » ricana le mage qui fit un pas vers lui, comme prêt à lui lancer un sort. C’est le moment que Cestmoiquichoisis attendait. Car elle ne partait jamais sans emmener des paquets de bonbons, et, parce qu’il était discret et qu’on ne faisait pas toujours attention à lui, Mine De Rien l’avait remarqué ! Lui seul partageait le secret de Cestmoiquichoisis et avait le droit de goûter à ces délicieux bonbons ronds. La jeune gourmande saisit deux poignées de ses bonbons ronds les plus durs, et les lança dans la cible tracée par son ami. Jeanne Délivre et Image se mirent à crier de peur pour Stanislas Delapage, pendant qu’Adèle Ivre hurlait au mage qu’ils pouvaient parler ensemble et trouver un accord, ce qui cacha le bruit des bonbons s’éparpillant derrière les pieds du mage.

Alors que le Mage Noir allait lancer une flèche de glace vers Stanislas Delapage, Jeanne Délivre bondit vers lui comme pour le frapper, en criant « Je n’abandonnerai jamais ! ». Le mage, furieux, recula pour mieux se préparer à lui répondre, mais il glissa sur les bonbons, qui roulèrent sous ses pieds. Déstabilisé, il ne parvint pas à rester debout lorsque Mine De Rien lui fit un croche-pied, et se retrouva sur le dos, laissant échapper un cri de douleur. Alors les six camarades se réunirent autour de lui. Adèle Ivre s’exclama alors : « Tous ensemble nous sommes plus forts, et nous vaincrons la noirceur du mage ! Unissons tous nos pouvoirs contre lui ! » Et en effet, ils avaient déjà uni leurs nombreux talents ! Avant que le Mage Noir n’ait le temps de se relever, Image claque des doigts pour le transformer en image. Mais il était plus habitué qu’elle aux maléfices, et l’évita en s’entourant d’une sphère de neige, qui absorba le sort d’Image. Avant qu’elle n’ait le temps de recommencer, il roula pour s’éloigner du groupe, sauta sur ses jambes, fit un pas en arrière, menaçant, prêt à les foudroyer par des éclairs de glace !

Mais, dominé par sa colère, il ne s’était pas aperçu qu’il s’approchait trop du cratère. Son pied s’appuya sur le vide, il perdit son équilibre et tomba en arrière ! Cependant, Adèle Ivre était très réactive et parvint à jeter une corde, qu’il attrapa dans sa chute. Le Mage Noir, accroché à la corde, pendait dans le cratère. Jeanne Délivre lui tendit la main, mais il était trop bas.

« Nous allons tirer pour vous remonter, lui cria-t-elle.

- Accrochez-vous ! Nous ne vous voulons pas de mal, ajouta Adèle Ivre.

- Sortez-moi de là ! » ordonna le mage.

Lorsqu’il fut à portée de bras, Stanislas Delapage lui tendit la main, mais le mage brandit alors son poignard, et l’agita pour le blesser.

« N’essayez pas de me toucher, vermine ! hurla-t-il d’un ton impérieux. Tirez !

- Tenez-vous bien, alors ! cria Adèle Ivre, bien qu’elle soit elle aussi en colère.

- Et prenez donc ma main, dit Stanislas Delapage. Vous risquez de lâcher la corde.

- Jamais ! » hurla encore le mage en agitant son couteau. Il voulait tant blesser la main de Stanislas Delapage, qu’il faisait de grands gestes sans songer à la corde qu’il ne tenait plus que d’une main. Et la longue lame de son poignard trancha la corde : il ne réussit pas à se rattraper, tant il tomba vite en arrière à cause de tous ses mouvements.

« La cooorde ! » hurlait-il en tombant dans le cratère.

Il disparut dans l’obscurité du volcan, et il n’y eut plus qu’un grand silence.

Adèle Ivre hocha la tête d’un air fâché : comme la méchanceté peut rendre bête, tout de même.

« La bête n’était pas ce qu’on croyait, dit-elle.

- Voici le dragon : il est inoffensif, maintenant. Nous pouvons le ramener chez lui. », dit Mine De Rien en montrant l’image dans son dos.

 

Tous les six approuvèrent, et se prirent dans les bras, tellement heureux d’avoir accompli leur mission. Accompli ? Non, pas encore !

Ils reprirent donc la route : une très longue route, mais qui leur sembla bien plus rapide et plus agréable, à présent ! Ils purent continuer à faire connaissance, et arrivèrent ainsi l’esprit joyeux chez Pierre Aimé Lyre.

 

Le pauvre libraire s’était usé les yeux et l’esprit en lisant, relisant, cherchant des secrets cachés dans le vieux livre millénaire. Il était courbé, ridé, et ses cheveux étaient blancs, et même, beaucoup moins nombreux qu’avant. Mais il était si soulagé de voir ses voisins revenir ! Si soulagé ! Croyez-moi, jamais il n’avait été aussi heureux de voir du monde que ce jour-là !

 

Tous les sept cherchèrent un long moment comment faire rentrer le dragon dans son livre, jusqu’à ce que Cestmoiquichoisis décide de simplement poser l’image sur le livre ouvert. Alors, Mine De Rien, qui tenait le marque-pages, s’écria :

« Oh, la carte disparaît ! Et… Un message ! »

Ils lurent alors le message, qui était une formule magique :

« N’allez pas chercher votre bonheur au loin

Ne détournez pas les yeux de vos voisins.

Il est temps : le dragon

rentre dans sa maison,

nid où l’attendent ses petits

qui étaient déjà dans le livre. »

 

Alors, une immense fumée jaune sortit à nouveau du vieux livre et envahit toute la librairie. Le dragon quitta l’image et remplit toute la pièce, volant sous le plafond, encombrant les rayonnages de ses plumes : nos héros se retrouvèrent rapidement coincés entre les couleurs chatoyantes du dragon, qui lança vers eux un regard chaleureux. Sa tête était si proche d’eux qu’ils purent voir, dans chacun de ses yeux, un immense cœur rouge battant la chamade. Son bec s’ouvrit, lâchant une musique merveilleuse, tandis qu’il était aspiré par le livre.

 

Pierre Aimé Lyre et ses six voisins restèrent sans voix un court instant. Puis, soudain, comme une explosion, ils éclatèrent de rire. Un rire merveilleux, empli de surprise, de soulagement, de joie… d’amitié.

 

Et, tout en riant, ils se dirent qu’il fallait à nouveau nettoyer et ranger toute la librairie, et cela les mit d’une merveilleuse humeur !

 

Depuis ce jour, Pierre Aimé Lyre, ses voisins, et toutes les personnes passant la porte de sa boutique, racontent volontiers cette histoire, qu’ils concluent ainsi :

 

« Voilà comment l’amitié et le courage ont vaincu un dragon.

Ou bien, du point de vue du dragon, comment nous avons pu nous protéger du danger en nous réunissant, comme une famille… »

 

Quant à moi, je vous l’assure, ce livre a bien existé, et toute cette histoire est vraie !

 

 

Mine De Rien

Adèle Ivre

Jeanne Délivre

Image

Stanislas Delapage

Cestmoiquichoisis

Magali

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